Manifeste pour la défense des intellectuels
Lorsqu'une personne pas intelligente lit un
texte intelligent, elle peut se dire
soit que "c'est compliqué", soit que
"c'est du charabia". La distinction tient juste à sa quantité
d'orgueil...
Entre le vingtième et le vingt-et-unième
siècle, on est passé de la prédominance de la première réaction,
à celle de la seconde. Les conséquences d'un point de vue
politique sont terrifiantes, car si cette tendance se maintient,
le citoyen moyen votera de plus en
plus pour des discours simplistes plutôt que d'accorder crédit à
ceux qui décrivent réellement la
complexité du monde actuel .
A moins que d'urgence, nous ne redorions tous, individuellement, l'image de l'intellectuel, mais tant que le bien commun reste défini en termes d'accumulation de profits obnubilante, l'intellectuel reste vu comme un parasite inutile.
Nous pouvons agir! Promouvons un intellectuel
aux idées utiles!
Vantons les mérites de la raison et de la
pensée - ce qui ne signifie pas pour autant que l'on dénigre les
qualités de coeur ou d'intuition, nullement antagonistes- !
N'est-ce pas fou comme la raison paraît
aujourd'hui tabou? Les artistes qui croient encore que
l'avant-gardisme consiste à des provocations de type sexuel ou à
dénoncer l'horreur du monde que le JT expose quotidiennement se
fourvoient. La transgression ultime aujourd'hui est de
promouvoir un retour aux valeurs du siècle des Lumières et de
promouvoir à nouveau la raison comme fondement du lien social.
Contrairement à que l'on pense, les problèmes de société actuels sont dus à un déficit de pensée, et non d'argent, ni même de bonne volonté (car, on l'oublie trop souvent, les pires tyrans souhaitent le bien : ils en ont juste une vision folle !).
Aujourd'hui, aux États-Unis, les Conservateurs
accusent "d'intellectuel"ceux qu'ils veulent décrédibiliser. Les Bolcheviques les mettaient au goulag. Les
premiers défendent des intérêts, les seconds s'étaient mis au
service d'un totalitarisme. Le
dénigrement de l'intelligence va mal avec la démocratie. Le combat pour
la reconnaissance de la valeur de la raison est donc urgent.
Que l'on ne se méprenne pas, il ne s'agit pas
de prôner une supériorité de l'intellect sur le physique ou sur les
sens pratique, artistique ou des affaires, mais de promouvoir
chacun à sa juste place.
En politique et en matière d'organisation sociale, l'intelligence et la raison DOIVENT prédominer.
Aujourd'hui estimer comme Churchill que "le meilleur argument contre la démocratie est une conversation de cinq minutes avec l'électeur moyen" serait jugé politiquement incorrect. On a extrapolé à tort de l'égalité de chaque homme, l'égalité de la pensée de chacun. Or la bêtise est une réalité répandue.
Du temps de nos
grands-parents, ceux qui avaient échoué à l'école demandaient l'avis du
curé, du maire, du docteur ou de l'instituteur avant de voter,
car ils savaient qu'ils ne savaient pas et que de plus
éduqués qu'eux avaient une vision plus large des enjeux
politiques.
Aujourd'hui, les enfants valorisés à l'école et abreuvés de
publicité qui visent à les convaincre qu'ils "le valent bien"
ainsi que les citoyens-consommateurs brossés dans le sens du poil font
des électeurs persuadés de la parfaite pertinence de leur jugement. Or
l'assurance, quand elle ne se marie pas avec le discernement
génère l'outrecuidance - mot qui gagnerait à sortir de
l'oubli collectif - et celle-ci mène à des décisions dangereuses...
Vive l'intelligence, vive le savoir, vive la raison !
Vive la vraie démocratie!
A M Estour