Tout est en feu

22/05/2021

Dans l'une de ses excellentes conférences, Gil Fronsdal évoque l'enseignement du Bouddha : "tout est en feu. Chaque objet, chaque pensée et chaque action est en feu. Ils brûlent du désir que nous avons à leur égard."

Or le désir est à l'origine de tous les dysfonctionnements du monde. Cependant le bouddhisme n'incite pas, pour autant, à l'abandonner, contrairement à ce qui est souvent pensé, juste à savoir s'en détacher.

Cela nécessite de se poser et d'observer chacun de ses attachements - pour la nourriture, pour son apparence, pour l'image que l'on voudrait que les autres aient de soi ou encore pour certaines valeurs - . Peu importe alors que certains désirs aliènent et que d'autres émancipent, on se contente de les identifier. Ce sont des fils qui lient et les abandonner un instant totalement permet de revenir un instant à un état d'équilibre où l'on n'est ni poussé, ni tiré par quoi que ce soit.

Or dans une société qui repose totalement sur l'aliénation au désir s'en dissocier peut la révolutionner.

Sans vassalité au désir, plus de soumission docile à la dictature de la mode, à la croissance du PIB, au désir d'avoir plus - quitte à s'empoisonner - .

Plus d'aliénation à perdre sa vie à la gagner.

La pollution est freinée d'elle-même, ainsi que l'exploitation de l'homme par l'homme.

Les désirs profonds émergent alors sous les désirs appris et l'on prend conscience que l'on fait partie d'une humanité qui habite une planète qui a tout pour la faire vivre et que la technologie offre, désormais, la sécurité longtemps rêvée contre la faim et les intempéries. L'intelligence de l'être humain lui permet, par ailleurs, notamment grâce aux ordinateurs, de partager les ressources (eau, nourriture, énergie) et les taches ingrates équitablement.

Quel monde émerge alors ? Ce monde est-il si loin de nous ?

Non, à peine l'aurons-nous fait advenir par la parole et la pensée qu'il se mettra en place car il répond bien mieux que le monde actuel à nos aspirations profondes pour la justice, l'accomplissement de soi et la liberté. Ce n'est pas un monde sans aucune pollution, sans morts, sans famines (liées à de mauvaises récoltes, par exemple), mais c'est un monde où l'on ne gaspille pas l'énergie à créer des désirs qui créent d'autres désirs dont l'assouvissement n'épanouit pas.

C'est un monde où l'on respire à nouveau.

Qui est prêt à payer pour cela le simple prix d'apprendre à se dissocier suffisamment du feu des désirs ?

© 2017 Anne-Marie Estour. Tous droits réservés. Crédits photos Anne-Marie Estour et Webnode
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